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Urbanisme : Les deux mécanismes d’annulation partielle d’un permis de construire

Par une décision en date du 1er mars 2013 n° 350306, le Conseil d’Etat a dissocié deux régimes distincts permettant au juge d’annuler partiellement un permis de construire.

En l’espèce, le préfet de la Manche avait autorisé la construction d’une éolienne et d’un poste de livraison sur le territoire de la commune de Gonfreville.

En première instance, le Tribunal administratif de Caen a annulé partiellement ledit permis de construire en tant qu’il autorisait la construction d’un poste de livraison situé dans le périmètre d’un monument historique classé sans que l’avis de l’architecte des bâtiments de France n’ait été recueilli.

En appel, la Cour administrative d’appel de Nantes a confirmé cette annulation partielle en se fondant sur les dispositions de l’article L. 600-5 du code de l’urbanisme, aux motifs que, d’une part, le poste de livraison et l’éolienne constituaient deux ouvrages matériellement distincts, et d’autre part, que l’absence de l’avis de l’ABF était régularisable. La Cour administrative d’appel a donc considéré que l’application de l’article L. 600-5 du code de l’urbanisme était conditionnée par le caractère divisible du projet.

Le Conseil d’Etat censure ce raisonnement pour erreur de droit, et précise les conditions dans lesquelles un permis de construire peut faire l’objet d’une annulation partielle.

Dans le cas d’un projet divisible, la haute assemblée rappelle sa solution jurisprudentielle déjà consacrée (Conseil d’Etat, 2 février 1979, Consorts Sénécal, n° 05808 ; Conseil d’Etat, 18 février 2005, Consorts Constant, n° 261171) :

« lorsque les éléments d’un projet de construction ou d’aménagement ayant une vocation fonctionnelle autonome auraient pu faire, en raison de l’ampleur et de la complexité du projet, l’objet d’autorisations distinctes, le juge de l’excès de pouvoir peut prononcer une annulation partielle de l’arrêté attaqué en raison de la divisibilité des éléments composant le projet litigieux ; ».

A défaut de projet divisible, le Conseil d’Etat indique qu’une annulation partielle peut être obtenue sur le fondement des dispositions de l’article L. 600-5 du code de l’urbanisme en démontrant que l’illégalité affecte une partie identifiable du projet, et qu’elle est susceptible d’être régularisée :

« il résulte des dispositions de l’article L. 600-5 citées ci-dessus qu’en dehors de cette hypothèse, le juge administratif peut également procéder à l’annulation partielle d’une autorisation d’urbanisme dans le cas où une illégalité affecte une partie identifiable du projet et où cette illégalité est susceptible d’être régularisée par un arrêté modificatif de l’autorité compétente, sans qu’il soit nécessaire que la partie illégale du projet soit divisible du reste de ce projet ; que le juge peut, le cas échéant, s’il l’estime nécessaire, assortir sa décision d’un délai pour que le pétitionnaire dépose une demande d’autorisation modificative afin de régulariser l’autorisation subsistante, partiellement annulée ; »

Ainsi, si le projet est divisible, un permis de construire pourra être partiellement annulé par le juge de l’excès de pouvoir, conformément au principe jurisprudentiel plus souple. En revanche, si le projet n’est pas divisible, l’annulation partielle pourra être demandée au juge sur le fondement de l’article L. 600-5 du code de l’urbanisme, dès lors que les deux conditions posées sont réunies.

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