La Cour de cassation a jugé que le propriétaire d’un bien en volume ne pouvait bénéficier du droit de délaissement, pourtant accordé aux propriétaires de terrains bâtis ou non (Civ. 3e, avis, 20 mars 2025, P-B, n° 25-70.001).
La Cour de cassation a été saisie pour avis par la Cour d’appel de Versailles qui a considéré que le droit de délaissement prévu par les dispositions de l’article L. 311-2 du code de l’urbanisme ne s’applique pas à une partie d’un bien organisé en volumes.
En l’espèce, le vendeur de lots en volume d’un centre commercial composé de 20 locaux a exercé son droit de délaissement à la suite de la renonciation d’une société publique locale déléguée par la ville de préempter ces locaux. La décision de préemption visait à transformer les locaux en logements et à créer un nouveau complexe commercial au sein d’une zone d’aménagement concerté.
Le vendeur a mis en demeure la commune d’acquérir le bien au prix initial. Toutefois, le conseil municipal a réduit le périmètre de la ZAC, excluant certains lots.
Le juge de l’expropriation a estimé l’action en délaissement recevable, et ce, même si elle portait sur des lots en volume s’inscrivant dans une partie de l’ensemble immobilier et la Cour administrative d’appel de Versailles, saisie par le vendeur, a annulé la délibération du conseil municipal.
La Cour d’appel de Versailles a saisi la Cour de cassation sur la question suivante : « le droit de délaissement prévu à l’article L. 311-2 du code de l’urbanisme est-il applicable à une partie d’un bien organisé en volumes ? »1.
La Cour de cassation a d’abord rappelé que la mise en œuvre du droit de délaissement est dans ces zones d’aménagement concerté, réservée aux propriétaires de terrains bâtis ou non2, et que ce droit n’est pas applicable aux lots de copropriété, qui ne portent que sur une quote-part indivise du terrain3.
Elle ajoute que « la division en volumes dérogeant à l’article 552 du code civil selon lequel la propriété du sol emporte la propriété du dessus et du dessous, le propriétaire d’un volume ne peut être considéré comme propriétaire d’un terrain au sens de l’article L. 311-2 du code de l’urbanisme ».
Ainsi, elle affirme que le droit de délaissement ne peut être mis en œuvre que par des propriétaires de terrains au sens strict.
En effet, elle estime que les volumes ne peuvent être assimilés à des terrains au sens de l’article L. 311-2 du code de l’urbanisme, car ils constituent des fractions de biens immobiliers ne correspondant pas à une parcelle distincte, mais résultent d’une division tridimensionnelle de l’espace, indépendamment de la propriété du sol.
Dès lors, la Cour de cassation a estimé que le droit de délaissement ne peut être invoqué que par les propriétaires d’un terrain au sens de l’article L. 311-2 du code de l’urbanisme.
En conséquence, un propriétaire d’un bien en volume devra faire face à d’éventuelles procédures d’expropriation ou de préemption sur son bien sans pouvoir mettre en œuvre son droit de délaissement.
1. Cour d’appel de Versailles, Chambre civile 1 4 expropriation, 12 novembre 2024, n° 23/02432
2. 3e Civ., 7 mai 1996, pourvoi n° 95-70.031, publié au Bulletin
3. 3e Civ., 10 mars 1982, pourvoi n° 81-70.312, publié au Bulletin