Dans une décision particulièrement intéressante du 4 octobre 2013, la cour administrative d’appel de Paris a confirmé le principe dégagé par plusieurs juridictions du fond, mais jamais énoncé par le Conseil d’Etat, selon lequel aucun titre exécutoire ne peut être émis par la personne publique cocontractante en cours d’exécution d’un marché public, avant l’établissement du décompte général et définitif.
La Cour juge ainsi :
« Considérant que, d’une part, il résulte de la combinaison de l’article L. 1617-5 du code général des collectivités territoriales et des articles 22, 23 et 25 du décret du 29 décembre 1962 que l’émission d’un titre de recettes ayant force exécutoire est réservée au recouvrement des créances publiques liquides et exigibles ; que, d’autre part, l’ensemble des opérations auxquelles donne lieu l’exécution d’un marché de travaux publics est compris dans un compte dont aucun élément ne peut être isolé et dont seul le solde arrêté lors du décompte définitif détermine les droits et obligations définitifs des parties ; qu’ainsi, en matière de marchés publics seul le solde débiteur dégagé du décompte, devenu définitif selon les prescriptions de l’article 13.42 du cahier des clauses administratives générales (CCAG) applicable aux marchés de travaux publics, permet de liquider la créance et d’en exiger le paiement par l’entreprise ».
Autrement dit, un titre exécutoire, notamment destiné à recouvrer des pénalités, ne peut pas être émis avant que le décompte général soit devenu définitif puisqu’il n’existe aucune créance liquide et exigible avant cette date.
Toutefois, la Cour semble ouvrir la possibilité aux parties de prévoir contractuellement de déroger à ce principe :
« l’article 13.12.5 du CCAG applicable aux marchés publics de travaux, auquel les parties n’ont pas entendu déroger, prévoit expressément que les pénalités doivent être comprises dans les décomptes mensuels pris en compte ensuite dans le décompte global ; que, dès lors, le SIEVD ne pouvait légalement, en dehors de ce cadre et alors que le règlement définitif des comptes n’était pas intervenu, émettre un titre de perception à l’encontre de la société Saacke en vue de recouvrer les pénalités appliquées au groupement d’entreprises ».
Le marché pourrait donc déroger à la règle, issue du CCAG, selon laquelle les pénalités sont intégrées dans les décomptes. Par voie de conséquence, les pénalités pourraient alors être recouvrées par voie de titres exécutoires avant l’établissement du décompte général et définitif.