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Marchés publics : Office du juge des référés précontractuels et contrôle des offres

Par une décision en date du 20 janvier 2016, le Conseil d’Etat est venu préciser l’office du juge des référés précontractuels en matière de contrôle des offres des candidats à l’attribution un marché public.

Une communauté d’agglomération de la Réunion (la CIVIS) avait lancé un marché public ayant pour objet la collecte et l’évacuation des déchets ménagers et assimilés.

Un candidat évincé avait alors introduit un référé précontractuel devant le tribunal administratif de la Réunion, en soutenant que son offre avait été dénaturée, puisque des corrections avaient été apportées par le pouvoir adjudicateur au décompte des emplois qu’il comptait affecter au marché.

Ce décompte était un élément d’appréciation du critère de « cohérence entre la décomposition du prix global et forfaitaire et la note méthodologique du candidat ».

Par un considérant de principe, la haute juridiction rappelle qu’il n’appartient pas au juge du référé précontractuel de se prononcer sur l’appréciation portée par le pouvoir adjudicateur sur la valeur ou les mérites respectifs des offres, mais qu’il peut en revanche sanctionner la dénaturation d’une offre par le pouvoir adjudicateur :

« 2. Considérant qu’il n’appartient pas au juge du référé précontractuel, qui doit seulement se prononcer sur le respect, par le pouvoir adjudicateur, des obligations de publicité et de mise en concurrence auxquelles est soumise la passation d’un contrat, de se prononcer sur l’appréciation portée sur la valeur d’une offre ou les mérites respectifs des différentes offres ; qu’il lui appartient, en revanche, lorsqu’il est saisi d’un moyen en ce sens, de vérifier que le pouvoir adjudicateur n’a pas dénaturé le contenu d’une offre en en méconnaissant ou en en altérant manifestement les termes et procédé ainsi à la sélection de l’attributaire du contrat en méconnaissance du principe fondamental d’égalité de traitement des candidats »

Au cas d’espèce, le Conseil d’Etat accueille le pourvoi en jugeant qu’aucune dénaturation de l’offre de la société requérante n’a été commise par le pouvoir adjudicateur, dès lors que les corrections apportées résultent uniquement des particularités des présentations de cette offre. Le juge des référés de première instance a ainsi méconnu son office, puisqu’il ne s’est pas limité à contrôler l’absence de dénaturation de l’offre :

« 3. Considérant que pour annuler, au stade de l’analyse des offres, la procédure de passation du lot n° 1 du marché public de collecte et d’évacuation des déchets ménagers et assimilés lancée par la communauté intercommunale des villes solidaires (CIVIS), le juge des référés du tribunal administratif de la Réunion a jugé que, pour apprécier défavorablement l’offre de la société Derichebourg Polyurbaine au regard du critère de « cohérence entre la décomposition du prix global et forfaitaire et la note méthodologique du candidat », la CIVIS avait apporté des corrections injustifiées au décompte des emplois que la société entendait affecter à l’exécution du marché ; qu’en procédant ainsi, il ne s’est pas borné à vérifier que la CIVIS n’avait pas dénaturé le contenu de l’offre de la société, mais s’est prononcé sur l’appréciation portée par le pouvoir adjudicateur sur la valeur de cette offre ; qu’il résulte de ce qui a été dit ci-dessus qu’il a commis une erreur de droit ; que, par suite, la CIVIS est fondée, sans qu’il soit besoin d’examiner les autres moyens du pourvoi, à demander l’annulation de l’ordonnance attaquée ».

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