Dans un arrêt du 24 février 2016, le Conseil d’Etat met un point d’arrêt à une pratique bien connue selon laquelle l’absence d’habilitation à signer l’acte d’engagement peut être soulevée par le pouvoir adjudicateur pour faire échec à un référé.
Plus précisément, dans cette affaire, un syndicat a lancé une procédure d’appel d’offres ouvert en vue de la passation d’un marché ayant pour objet le transport, le traitement, la valorisation et la commercialisation de mâchefers produits par l’unité de valorisation énergétique.
Un des candidats concurrents évincés a saisi le juge des référés en vue de l’annulation de la procédure puis du marché, celui ayant été signé en cours d’instance.
Afin d’éviter que ce recours ne prospère, le pouvoir adjudicateur a soulevé le fait que la société requérante ne pouvait pas être lésée par les manquements aux obligations de publicité et de mise en concurrence invoquées par elle puisque son offre était irrégulière en tant qu’elle était signée par une personne qui n’était pas mandatée ou habilitée à l’engager.
Or, par une lecture combinée des articles 11, 45-I et 52-I du code des marchés publics qui distinguent bien la candidature de l’offre, le Conseil d’Etat pose le principe selon lequel :
« […] il résulte des dispositions de l’article 45 du code des marchés publics que la production des documents relatifs aux pouvoirs des personnes habilitées à engager un candidat est exigible au stade de l’examen des candidatures ; qu’une offre ne saurait être regardée, par elle-même, comme irrégulière, au seul motif que le pouvoir adjudicateur ne dispose pas des documents attestant que le signataire de l’acte d’engagement est habilité à représenter l’entreprise candidate ; que, lorsque l’acte d’engagement est signé par une personne qui se présente comme un responsable de cette entreprise, il est loisible au pouvoir adjudicateur, à supposer qu’il doute de la capacité du signataire à engager le candidat, de solliciter la production des documents justifiant de cette capacité ; que, par suite, le juge des référés du tribunal administratif de Rouen n’a pas commis d’erreur de droit en jugeant que le syndicat mixte pour l’étude et le traitement des ordures ménagères de l’Eure, à défaut pour lui de s’être assuré que l’acte d’engagement remis par la société SNN n’avait pas été signé par une personne ayant qualité pour engager la société, ne pouvait se prévaloir de l’irrégularité de son offre pour soutenir qu’elle ne pouvait être lésée par les manquements aux obligations de publicité et de mise en concurrence qu’elle invoquait ; ».
Partant, les pouvoirs adjudicateurs ne peuvent plus se prévaloir du défaut d’une habilitation à signer un acte d’engagement qui aurait pu être régularisé via la procédure de l’article 52 du CMP, pour justifier l’irrégularité d’une offre.