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Les pénalités de retard ne peuvent pas faire l’objet d’un critère de sélection des offres

Par un arrêt du 29 mai 2019, la Cour administrative de Versailles est venue clôturer le litige qui opposait la société Savoie et la communauté de communes de l’Arpajonnais.

La communauté de communes a lancé en octobre 2009 une consultation en vue de la passation d’un marché de travaux, pour la construction d’un gymnase. S’estimant irrégulièrement évincée de la procédure, la société Savoie a adressé à la communauté de communes des demandes indemnitaires.

La société requérante soulevait le moyen selon lequel l’utilisation d’un critère de sélection des offres relatif aux pénalités de retard, par le pouvoir adjudicateur, était irrégulière.

En l’espèce, les offres des candidats étaient en effet appréciées au regard d’un critère « prix » à hauteur de 40 %, et d’un critère « valeur technique » à hauteur de 60 %. Il était prévu que le critère de la valeur technique serait décomposé en quatre sous-critères, dont celui de la pénalité pour dépassement du délai, noté sur 10 points.

Saisie du litige, la CAA de Versailles avait jugé que le critère relatif aux pénalités de retard était régulier, en considérant qu’il « tend à mesurer la capacité technique de l’entreprise à respecter des délais d’exécution prévus dans les documents contractuels et n’est pas sans lien avec la pertinence des moyens techniques qu’elle entend mettre en œuvre pour respecter les délais de réalisation du marché » (Flash info – CAA Versailles, 22 juin 2017, n°15VE02147).

Saisi à son tour, le Conseil d’Etat avait annulé cette décision, en posant le principe selon lequel une collectivité ne peut pas sélectionner les offres en fonction de l’importance des pénalités de retard auxquelles les candidats sont prêts à s’exposer (Flash info – Conseil d’Etat, 9 novembre 2018, n°413533).

L’affaire a alors été renvoyée devant la Cour administrative de Versailles, laquelle fait application du principe dégagé par le Conseil d’Etat, et juge :

« 5. Un sous-critère relatif au montant des pénalités à infliger en cas de retard dans l’exécution des prestations, qui n’a ni pour objet ni pour effet de différencier les offres au regard du délai d’exécution des travaux, ne permet pas de mesurer la capacité technique des entreprises candidates à respecter des délais d’exécution du marché ni d’évaluer la qualité technique de leur offre (…) »

Selon cette interprétation, le régime des pénalités de retard ne permet pas de révéler les modalités d’exécution du marché telles que proposées par les candidats, alors même qu’il s’agit précisément de la finalité d’un critère technique.

En effet, d’une part la personne publique peut toujours décider de ne pas appliquer les pénalités, et d’autre part, le juge peut, dans certains cas, moduler leur montant.

Il en résulte qu’un tel critère se révèle finalement être artificiel, dès lors que les pénalités pourront potentiellement ne jamais être appliquées.

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