Incidence des simulateurs d’offres fournis aux candidats lors de la procédure de passation sur l’évaluation des offres finales

Par un arrêt en date du 19 avril 2023, Siemens SAS contre le Parlement européen, le Tribunal de l’Union Européenne a précisé que si un simulateur d’offres n’a pas été utilisé dans l’évaluation finale des offres, l’erreur l’affectant n’a pas d’incidence sur le résultat de cette évaluation (TUE, 19 avril 2023, Siemens SAS, affaire T 74/22).

Le Parlement européen a lancé une procédure d’appel d’offres visant à renouveler le système de sécurité incendie du Parlement à Strasbourg.

Pour les lots n°1 et n°2, le dossier d’appel d’offres comprenait un « simulateur d’offres ». Ce dernier permettait aux soumissionnaires de « faciliter la compréhension des modalités d’évaluation ainsi que pour aider les soumissionnaires à établir leurs offres ». Plus concrètement, le simulateur (en l’espèce un fichier Excel) permettait aux soumissionnaires de comparer deux offres distinctes, selon les données rentrées pour chaque sous-critère, aboutissant alors à une simulation de notation. Il est à noter que seuls les points relatifs au critère prix pouvaient faire l’objet d’une telle simulation.

Le Parlement européen a attribué le lot n°1 à la société Santerne Alsace et le lot n°2 à la société Détection électronique française.

Le groupement d’entreprises composé des sociétés Siemens et Eiffage (mandataire), candidat évincé, a sollicité des explications sur le rejet de leurs offres après avoir constaté que le simulateur ne donnait pas le même résultat que l’évaluation faite par le comité d’évaluation.

Le Parlement européen a alors répondu que l’attribution du marché « a été fondée sur les seuls critères précisés à l’article 16 du cahier des charges, dont la méthode avait été clairement décrite ». En outre il a rappelé que le simulateur d’offres mis à disposition devait être considéré comme simple outil « sans valeur contractuelle » dont le résultat obtenu ne pouvait pas lier le comité d’évaluation. Il admet également qu’une erreur dans le simulateur d’offres a été constatée.

La société Siemens a dès lors saisi le Tribunal de l’Union européenne afin de faire annuler les décisions du Parlement européen de ne pas retenir ses offres et d’attribuer le marché à d’autres soumissionnaires.

Faisant application de de l’arrêt du 29 avril 2004, Commission/CAS Secchi di Frutta, C 496/99 P, EU : C:2004:236 (voir point 110), le Tribunal a rappelé que le principe d’égalité de traitement des soumissionnaires « a essentiellement pour but de garantir l’absence de risque de favoritisme et d’arbitraire de la part du pouvoir adjudicateur. Il implique que toutes les conditions et toutes les modalités de la procédure d’attribution soient formulées de manière claire, précise et univoque, dans l’avis de marché ou dans le cahier des charges, de façon, d’une part, à permettre à tous les soumissionnaires raisonnablement informés et normalement diligents d’en comprendre la portée exacte et de les interpréter de la même manière et, d’autre part, à mettre le pouvoir adjudicateur en mesure de vérifier effectivement si les offres des soumissionnaires correspondent aux critères régissant le marché en cause ».

Le Tribunal poursuit en indiquant que les parties s’accordent sur le fait qu’une erreur dans le simulateur d’offre a été constatée.

Néanmoins, il fait également remarquer que la requérante, n’a pas formellement prouvé que le Parlement a utilisé réellement le simulateur d’offres dans son évaluation des offres finales.

Aussi, le Tribunal constate que le cahier des clauses techniques particulières et la première page du simulateur d’offres précisaient que la simulation proposée n’avait aucune « valeur contractuelle ». Ainsi, les soumissionnaires ne pouvaient pas placer une confiance légitime dans l’attribution du même nombre de points par le comité d’évaluation que celui résultant du simulateur.

En conséquence, le Tribunal de l’Union Européenne rejette la requête de la société Siemens puisqu’ « il résulte de ce qui précède que la mesure où le simulateur d’offres n’a pas été utilisé dans l’évaluation des offres, l’erreur affectant ce simulateur n’a pas eu d’incidence sur l’évaluation des offres effectuée par le comité d’évaluation et sur le résultat de cette évaluation. ».

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