De la qualification et de la portée des avant-contrats de vente d’immeuble

Doit être requalifiée en promesse unilatérale de vente une promesse intitulée synallagmatique par les parties, dès lors, qu’il existe un déséquilibre significatif dans les obligations réciproques des parties.

Deux sociétés ont signé un acte sous seing privé intitulé « promesse synallagmatique de vente et d’achat » portant sur des terrains destinés à la construction d’un centre commercial.

La convention stipulait que « le promettant promet de vendre au bénéficiaire qui s’engage à acquérir sous les conditions générales et suspensives prévues ci-après ».

Les conditions suspensives ont été réalisées mais, un désaccord étant survenu entre les parties, l’acte authentique n’a pas été signé. Le bénéficiaire de la promesse a assigné le promettant (vendeur), pour voir requalifier l’accord des parties en promesse unilatérale de vente et voir constater la nullité de la convention faute d’enregistrement dans le délai de dix jours, prévu par l’article 1589-2 du code civil afin d’obtenir la restitution de l’acompte versé.

Rappelons que la promesse unilatérale de vente portant notamment sur un immeuble, un droit immobilier, est nulle si elle n’a pas été enregistrée auprès de l’administration fiscale dans un délai de dix jours à compter de la date de son acceptation par le bénéficiaire (C. civ. art. 1589-2).

La promesse est unilatérale lorsqu’elle réserve au bénéficiaire le droit d’opter pour la conclusion d’un contrat dont les éléments essentiels sont déterminés et pour la conclusion duquel il ne manque que le consentement du bénéficiaire (art.1124 du Code civil).

En revanche, la promesse est synallagmatique lorsqu’elle comporte des engagements réciproques des parties (art. 1106 du Code civil).

En l’espèce, le promettant soutenait qu’il s’agissait d’une promesse synallagmatique, dès lors que, aux termes de l’acte, « le promettant promet de vendre au bénéficiaire qui s’engage à acquérir », que les parcelles étaient identifiées par leur référence cadastrale et que le prix (3 770 000 € TTC) et ses modalités de paiement étaient fixés.

Toutefois, la promesse a été requalifiée par la Cour de Cassation, en promesse unilatérale de vente, aux motifs

« (…) que la vente était subordonnée à la réalisation des conditions suspensives dans les termes prévus à la convention, que l’article 10 déterminait une date limite pour la levée de l’option qui était postérieure à la date de réalisation des conditions suspensives, que l’article 11 prévoyait l’abandon des acomptes versés au promettant à titre d’indemnité d’immobilisation si le bénéficiaire ne manifestait pas son intention d’acquérir et que, si celui-ci pouvait renoncer à acquérir sous la seule sanction de perdre les sommes versées représentant 10 % du prix de vente hors taxes, le promettant ne pouvait renoncer à vendre et pouvait donc y être contraint, ce qui démontrait un déséquilibre significatif dans les prestations réciproques des parties (…)(Cass. 3ème civ 7 juin 2018, n°17-18-670). » 

La Cour de Cassation a identifié un déséquilibre significatif dans les prestations des parties imposant la requalification de l’avant contrat en promesse unilatérale.

Cette promesse unilatérale a été annulée et le promettant a été condamné à restituer les sommes déjà versées par le bénéficiaire.

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