Un récent arrêt de la Cour administrative d’appel de Nancy est venu apporter d’utiles précisions sur les conditions dans lesquelles les collectivités peuvent recourir au contrat de VEFA (vente en l’état futur d’achèvement).
La VEFA est une opération par laquelle le vendeur transfère immédiatement à l’acquéreur ses droits sur le sol ainsi que la propriété des constructions existantes, l’acquéreur devenant propriétaire des ouvrages au fur et à mesure de leur réalisation (Article 1601-3 du code civil).
Elle constitue un outil attractif pour les collectivités, qui peuvent ainsi transférer la maîtrise d’ouvrage des travaux et en différer le paiement, dès lors notamment qu’en principe, le contrat passé en VEFA n’est pas soumis au régime des marchés publics, et donc, aux obligations de publicité et de mise en concurrence (CE, 8 février 1991, n°57679).
La question de la qualification d’une VEFA en marché public mérite néanmoins un regard juridique actualisé, en raison de l’évolution récente et profonde du droit des marchés publics intervenue par la réforme de 2015 et 2016, et dorénavant consacrée au sein du code de la commande publique.
Aujourd’hui, un contrat peut en effet être qualifié de marché public alors même que la personne publique n’exerce pas la maîtrise d’ouvrage des travaux (comme c’est le cas en VEFA), si l’ouvrage répond « aux exigences fixées par l’acheteur qui exerce une influence déterminante sur sa nature ou sa conception[1] ».
L’arrêt rendu par la CAA de Nancy vient précisément illustrer ce qu’est un contrat qui ne répond PAS à la qualification de marché public de travaux. La Cour se fonde sur le faisceau d’indices suivant :
1°) La chronologie des événements : le promoteur a obtenu le permis de construire de l’ouvrage et engagé les démarches de commercialisation avant que la collectivité ne s’y intéresse. Il est donc primordial que le vendeur soit à l’origine de l’opération et qu’elle apparaisse comme une opportunité pour la collectivité, afin d’échapper à la qualification de marché public.
2°) L’absence de caractéristiques particulières qui auraient eu pour objet de répondre aux besoins de la collectivité : l’ouvrage acquis en VEFA ne répond à aucune exigence (ni technique, ni programmatique) fixée par l’acheteur public, de sorte que l’influence déterminante de la collectivité n’est pas caractérisée, ce qui est corroboré par le fait que la collectivité a ultérieurement passé des marchés ayant pour objet l’aménagement de l’ouvrage.
La Cour conclut que :
« (…) Metz Métropole n’a donc exercé aucune influence déterminante sur sa nature ou la conception de l’ensemble immobilier, lequel n’a été conçu ni à l’initiative de Metz Métropole, ni en fonction de ses besoins, de sorte que l’opération en cause ne peut être qualifiée de marché public de travaux. »
CAA Nancy, 15 avril 2021, n° 19NC02073