Urbanisme : Prescription de la créance du pétitionnaire : la double peine.

Des époux ont construit un hangar agricole sur le fondement d’un permis de construire délivré le 24 octobre 1987, contesté devant le juge administratif. Par décision du 31 juillet 1996, le Conseil d’État a définitivement annulé ce permis et un voisin a alors saisi la juridiction judiciaire afin qu’elle les condamne à indemniser les troubles de voisinage causés par l’installation et à la démolir.

Ces demandes ont été accueillies par la Cour d’appel d’Angers par décision du 17 avril 2001 signifiée le 3 juillet. Les époux ont alors saisi le juge administratif d’une demande tendant à voir réparer les préjudices qu’ils estimaient avoir subis du fait de l’illégalité du permis de construire qui leur avait été accordé.

La Commune de Saint-Mathurin-sur-Loire a alors fait valoir que la créance des époux était prescrite.

Le Conseil d’État a considéré que « la créance détenue, le cas échéant, par le titulaire d’un permis de construire jugé illégal par la juridiction administrative, au titre du préjudice lié à la condamnation, par une juridiction judiciaire, à démolir le bâtiment litigieux ou à indemniser les préjudices qu’il a causés, se prescrit à compter du premier jour de l’année suivant celle au cours de laquelle la décision de la juridiction judiciaire est passée en force de chose jugée ».

La Haute juridiction précise :

« (…) Considérant, d’une part, que M. et Mme B demandent réparation du préjudice matériel qu’ils estiment avoir subi du fait des frais engagés pour la transformation de leur stabulation en bâtiment de stockage ainsi que du préjudice moral qui résulterait de l’illégalité du permis de construire délivré le 24 octobre 1987 ; que si le fait générateur de la créance qu’ils sont susceptibles de détenir à ce titre trouve sa source dans l’illégalité du permis de construire, cette créance, à la supposer établie, ne peut avoir acquis un caractère certain que du fait de l’intervention de l’arrêt de la cour d’appel d’Angers, signifié le 3 juillet 2001, leur ordonnant de détruire la stabulation litigieuse, sans qu’y fasse obstacle la circonstance qu’en l’espèce, les époux B ont pu, en définitive, se borner à transformer la stabulation litigieuse ; que la prescription a couru à compter du 1er janvier 2002 et non, comme le soutiennent les requérants en se prévalant de la date à laquelle l’astreinte prononcée par la cour d’appel a commencé à courir, à compter du 1er janvier 2003 ; qu’elle était ainsi acquise, en application de la loi du 31 décembre 1968 précitée, le 8 juin 2006, date de la demande d’indemnisation de M. et Mme B ».

En l’espèce, le fait générateur de la créance des époux trouve sa source dans l’illégalité du permis de construire mais n’a acquis un caractère certain que par l’intervention de l’arrêt de la cour d’appel d’Angers, signifié le 3 juillet 2001.

La prescription a donc commencé à courir le 1er janvier 2002, dès lors au 8 juin 2006, date de la demande des époux, la prescription était donc acquise.

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