Urbanisme : Principe de précaution : oui… sous réserve de risques justifiés

Dans un arrêt rendu le 30 janvier 2012, le Conseil d’Etat précise sa jurisprudence relative à l’opposabilité du principe de précaution aux autorisations d’urbanisme délivrées pour l’installation d’antennes relais de téléphonie mobile.

En l’espèce, le maire de Noisy-Le-Grand avait fait opposition par un arrêté du 20 mars 2009 à la déclaration préalable déposée par la société Orange en vue de l’installation d’une antenne de téléphonie mobile et de baies techniques sur un terrain situé sur le territoire de la commune et ce, sur le fondement de l’article R. 111-2 du code de l’urbanisme et du principe de précaution.

Dans un considérant de principe les juges estiment :

« Que s’il appartient, dès lors, à l’autorité administrative compétente de prendre en compte le principe de précaution lorsqu’elle se prononce sur l’octroi d’une autorisation délivrée en application de la législation sur l’urbanisme, les dispositions de l’article 5 de la Charte de l’environnement ne permettent pas, indépendamment des procédures d’évaluation des risques et des mesures provisoires et proportionnées susceptibles, le cas échéant, d’être mises en œuvre par les autres autorités publiques dans leur domaine de compétence, de refuser légalement la délivrance d’une autorisation d’urbanisme en l’absence d’éléments circonstanciés faisant apparaître, en l’état des connaissances scientifiques, des risques, même incertains, de nature à justifier un tel refus ; »

En d’autres termes, si l’autorité administrative doit prendre en compte le principe de précaution prévu à l’article 5 de la Charte de l’environnement, la seule référence à ce principe ne lui permet pas de refuser légalement la délivrance d’une autorisation d’urbanisme. La preuve « d’éléments circonstanciés » est requise pour que le Maire puisse, par application de ce principe, refuser la délivrance d’une autorisation d’urbanisme.

Le Conseil d’Etat annule en conséquence pour erreur de droit le jugement rendu par le Tribunal administratif de Montreuil qui avait jugé que le maire avait pu s’opposer à la déclaration préalable sur le fondement du principe de précaution au regard notamment des normes de distance minimale adoptées dans plusieurs pays voisins, sans rechercher si des éléments circonstanciés étaient de nature à justifier cette opposition.

Cette décision fait suite aux trois décisions d’Assemblée rendues le 26 octobre 2011 dans lesquelles le Conseil d’Etat a estimé que le maire n’a pas la compétence pour réglementer par arrêté l’implantation des antennes relais sur le territoire de sa commune sur le fondement de son pouvoir de police générale, le principe de précaution ne lui permettant pas d’excéder son champ de compétence et d’intervenir en dehors de ses domaines d’attributions (Conseil d’Etat, 26 octobre 2011, Commune de Saint Denis, Pennes-Mirabeau et Bordeaux, n° 326492, 329904, 341767) (voir le flash info du 28 octobre 2011).

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