Recours contre la décision informant de retenues sur traitement : excès de pouvoir ou plein contentieux ?

Les conclusions dirigées à l’encontre d’une lettre notifiant à un agent public des retenues sur traitement pour absence de service fait relèvent de l’excès de pouvoir, sauf si la lettre peut être assimilée à un titre de perception dès lors qu’elle mentionne le montant de la créance ou qu’elle émane d’un organisme employeur doté d’un comptable public (CE, avis, 25 mai 2023, La Poste, n°471035).

Saisi d’une demande d’avis de la Cour administrative d’appel de Versailles en application de l’article L. 113-1 du Code de justice administrative, le Conseil d’Etat s’est prononcé sur la nature d’un recours formé contre une lettre informant un agent public des retenues sur son traitement à venir en raison de l’exercice injustifié de son droit de retrait.

Dans les faits, Mme B., agent fonctionnaire de La Poste, a exercé son droit de retrait pendant les premières semaines de la pandémie de Covid-19 et s’est vu imputer des retenues sur traitement par son employeur pour absence de service fait.

Mme B. a contesté la décision par un recours gracieux puis contentieux, demandant au tribunal administratif de Versailles d’annuler la décision et d’ordonner la restitution des sommes retenues.

Hormis les cas où le recours relève par nature du plein contentieux, comme notamment le contentieux des titres de perception, le Conseil d’Etat rappelle que la nature d’un recours dirigé contre une décision à objet pécuniaire est définie par les conclusions et moyens dirigés à l’encontre de la décision conformément à la jurisprudence Lafage (CE, 8 mars 1912, n°42612 ; voir aussi CE, 9 février 1968, Sté La Foncière des Champs Elysées, n° 70352, A).

Appréciant le cas d’espèce, le Conseil d’Etat précise qu’une lettre informant des retenues sur traitement ne peut être assimilée à un titre de perception que si l’une des conditions est remplie, à savoir, si elle indique le montant de la créance ou si elle émane d’un organisme employeur doté d’un comptable public. Si tel n’est pas le cas, le droit commun prévaut et les conclusions dirigées contre les retenues sur traitement ont le caractère d’un recours pour excès de pouvoir.

Le Conseil d’Etat rappelle encore que des conclusions relevant du plein contentieux demandant la restitution des sommes prélevées peuvent coexister avec des conclusions relevant de l’excès de pouvoir, sans avoir pour effet de donner à l’ensemble des conclusions le caractère d’une demande de plein contentieux (CE, sect., 9 décembre 2011, C…, n° 337255, A).

Enfin, saisi d’une seconde question quant à la méconnaissance de l’office du juge, statuant à tort en excès de pouvoir ou en plein contentieux, le Conseil d’Etat rappelle, en dépit des interrogations du rapporteur public quant au rapprochement des deux types de recours, que la méconnaissance de tout ou partie de son office relève d’un moyen d’ordre public qui peut être soulevé à tout moment par les parties.

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