Précisions sur la notion d’intérêt à agir et la qualité de propriétaire

Par une décision rendue le 25 janvier 2023, le Conseil d’Etat a précisé les pièces qu’une personne, entendant agir comme propriétaire voisin d’une autorisation d’urbanisme, devait fournir pour justifier d’un intérêt à agir et a ouvert l’intérêt à agir à une personne qui peut sérieusement revendiquer la propriété d’un bien devant le juge compétent (CE, 25 janvier 2023, n°445937, aux tables).

La communauté de communes Aunis Atlantique a mis en vente une parcelle d’une contenance de 6016 m² dans une zone d’activités.

Les sociétés Lowina et Touche Automobiles ont fait part de leur intention d’acquérir cette parcelle.

Par un courrier du 21 août 2018, la communauté de communes a informé les deux sociétés de son intention de céder sa parcelle à la société Lowina.

Le prix de la parcelle a été fixé par une délibération du 26 septembre 2018 du conseil communautaire.

Le 19 avril 2019, la société Touche Automobiles a assigné la communauté de communes aux fins de voir juger parfaite la vente de la parcelle à son profit, après avoir adressé le 17 octobre 2018 une offre d’achat de cette parcelle au prix fixé par la délibération du 26 septembre 2018 précitée.

Par une délibération du 2 décembre 2019, le conseil communautaire a formalisé sa décision de vendre sa parcelle à la société Lowina.

Par un arrêté du 11 décembre 2019, le maire de la commune de Marans a délivré à la société Lowina un permis de construire pour la construction d’un garage de mécanique automobile et de vente de véhicules sur cette parcelle.

Par deux ordonnances rendues les 22 avril 2020 et 3 septembre 2020, le tribunal administratif de Poitiers et la cour administrative d’appel de Bordeaux ont rejeté la requête présentée par la société Touche Automobiles. C’est dans ce contexte que cette dernière se pourvoit en cassation.

La question principale de cette espèce tenait à l’intérêt à agir de cette société dans la mesure où elle justifiait son intérêt à agir par l’introduction d’une assignation en vente parfaite à son profit de la parcelle.

En premier lieu, le Conseil d’Etat rappelle qu’il :

« il résulte des dispositions de l’article L. 600-1-2 du code de l’urbanisme que la contestation d’une décision relative à l’occupation ou à l’utilisation du sol régie par le code de l’urbanisme est ouverte aux personnes physiques ou morales qui justifient de leur qualité d’occupant régulier ou de propriétaire d’un bien immobilier dont les conditions d’occupation, d’utilisation ou de jouissance sont de nature à être directement affectées par le projet ».

En second lieu, et tel est l’apport principal de cette décision, le Conseil d’Etat précise que :

« Une personne, entendant agir comme propriétaire d’un tel bien, qui ne fait état ni d’un acte de propriété, ni d’une promesse de vente, ni d’un contrat préliminaire mentionné à l’article L. 261-15 du code de la construction et de l’habitation ne justifie pas d’un intérêt de nature à lui donner qualité pour demander l’annulation d’une décision relative à l’occupation ou à l’utilisation du sol régie par le code de l’urbanisme, sauf à ce qu’elle puisse sérieusement revendiquer la propriété de ce bien devant le juge compétent ».

En l’espèce, la société Touche Automobiles ne pouvait se prévaloir ni d’un acte de propriété, ni d’une promesse de vente, ni d’un contrat préliminaire mentionné à l’article L. 261-15 du code de la construction et de l’habitation. Il convenait donc de savoir si cette société pouvait, au sens de ce considérant de principe, sérieusement revendiquer la propriété de ce bien devant le juge compétent.

Le Conseil d’Etat juge qu’« en jugeant que la simple présentation d’une offre pour le terrain d’assiette du projet suivie de l’engagement d’une action devant le juge civil » ne pouvaient fonder son intérêt à agir, la cour administrative d’appel de Bordeaux n’a ni commis d’erreur de droit, ni inexactement qualifié les faits qui lui étaient soumis.

La haute juridiction considère ainsi que la simple présentation d’une offre pour le terrain d’assiette du projet suivie de l’engagement d’une action devant le juge civil ne sauraient faire regarder la société Touche Automobiles comme pouvant sérieusement revendiquer la propriété de ce terrain.

Sources et liens

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