Par une décision rendue le 14 octobre 2024, le Conseil d’Etat a jugé que la procédure de régularisation en cours d’instance prévue à l’article L. 600-5-1 du code de l’urbanisme ne peut pas être appliquée successivement pour la régularisation d’un même vice affectant le permis de construire initial (CE 14 octobre 2024, n° 471936).
En l’espèce, le préfet de Vaucluse a accordé à une société deux permis de construire en vue de l’édification d’une centrale photovoltaïque au sol.
Par un jugement du 4 juin 2019, le tribunal administratif de Nîmes, saisi par plusieurs requérants, a rejeté leur requête en annulation.
Par un premier arrêt du 28 décembre 2021, la cour administrative d’appel de Marseille, saisie sur appel de la société pétitionnaire, a sursis à statuer sur le fondement de l’article L. 600-5-1 du code de l’urbanisme, afin de permettre, jusqu’à l’expiration d’un délai de huit mois, la régularisation des permis de construire litigieux au regard des illégalités retenues par la cour.
Par un deuxième arrêt du 5 janvier 2023, la cour administrative de Marseille a annulé, d’une part, le jugement du tribunal administratif de Nîmes et, d’autre part, les arrêtés portant permis de construire et ceux portant permis de construire modificatifs.
La société pétitionnaire a formé un pourvoi en cassation à l’encontre de ces arrêts.
Saisi à son tour, le Conseil d’Etat a, dans un premier temps, rejeté la demande d’annulation du premier arrêt en date du 28 décembre 2021 de la cour administrative d’appel de Marseille.
Dans un second temps, le Conseil d’Etat est venu préciser le régime du mécanisme de sursis à statuer en vue de la régularisation en cours d’instance d’une autorisation d’urbanisme, prévu à l’article L. 600-5-1 du code de l’urbanisme.
D’abord, le Conseil d’Etat a jugé que :
« Lorsque le ou les vices affectant la légalité de l’autorisation d’urbanisme dont l’annulation est demandée, sont susceptibles d’être régularisés, le juge doit surseoir à statuer sur les conclusions dont il est saisi contre cette autorisation. Il invite au préalable les parties à présenter leurs observations sur la possibilité de régulariser le ou les vices affectant la légalité de l’autorisation d’urbanisme. Le juge n’est toutefois pas tenu de surseoir à statuer, d’une part, si les conditions de l’article L. 600-5 du code de l’urbanisme sont réunies et qu’il fait le choix d’y recourir, d’autre part, si le bénéficiaire de l’autorisation lui a indiqué qu’il ne souhaitait pas bénéficier d’une mesure de régularisation. Il en va de même lorsque le juge constate que la légalité de l’autorisation d’urbanisme prise pour assurer la régularisation de ce premier vice est elle-même affectée d’un autre vice, qui lui est propre ».
Ensuite, le Conseil d’Etat a jugé que :
« Lorsqu’une mesure de régularisation a été notifiée au juge après un premier sursis à statuer, et qu’il apparaît, au vu des pièces du dossier, que cette mesure n’est pas de nature à régulariser le vice qui affectait l’autorisation d’urbanisme initiale, il appartient au juge d’en prononcer l’annulation, sans qu’il y ait lieu de mettre à nouveau en œuvre la procédure prévue à l’article L. 600-5-1 du code de l’urbanisme pour la régularisation du vice considéré ».
Autrement dit, si la seconde autorisation n’est pas suffisante pour régulariser la première, le juge ne peut pas surseoir à statuer une seconde fois pour permettre au pétitionnaire et à la collectivité de régulariser le même vice.
Il conserve toutefois la possibilité d’user du mécanisme prévu à l’article L. 600-5-1 lorsqu’un vice propre entache d’illégalité la seconde autorisation.
Appliquant ces principes à l’espèce, le Conseil d’Etat a jugé que la société pétitionnaire n’était pas fondée à demander l’annulation du deuxième arrêt en date du 5 janvier 2023 de la cour administrative de Marseille, et a rejeté son pourvoi.