En vertu de l’article 30 de l’ordonnance n° 2015-899 du 23 juillet 2015 relative aux marchés publics, les préoccupations de développement durable sont au centre de l’achat public.
Les acheteurs publics sont incités à intégrer des critères RSE (Responsabilité Sociale des Entreprises) dans leurs appels d’offres.
Par un arrêt en date du 25 mai 2018, le Conseil d’Etat est venu préciser l’utilisation des critères sociaux dans l’attribution des marchés publics.
Il rappelle, dans un premier temps, le principe selon lequel les critères comprenant des aspects sociaux doivent être liés avec l’objet du marché ou ses conditions d’exécution :
« 7. Considérant qu’il résulte de ces dispositions que si l’acheteur peut, pour sélectionner l’offre économiquement la plus avantageuse, mettre en oeuvre des critères comprenant des aspects sociaux, c’est à la condition, notamment, qu’ils soient liés à l’objet du marché ou à ses conditions d’exécution ; qu’à cet égard, des critères à caractère social, relatifs notamment à l’emploi, aux conditions de travail ou à l’insertion professionnelle des personnes en difficulté, peuvent concerner toutes les activités des entreprises soumissionnaires, pour autant qu’elles concourent à la réalisation des prestations prévues par le marché ; que ces dispositions n’ont, en revanche, ni pour objet ni pour effet de permettre l’utilisation d’un critère relatif à la politique générale de l’entreprise en matière sociale, apprécié au regard de l’ensemble de son activité et indistinctement applicable à l’ensemble des marchés de l’acheteur, indépendamment de l’objet ou des conditions d’exécution propres au marché en cause ; ».
En l’espèce, la question qui se posait été celle de savoir s’il était possible, pour le pouvoir adjudicateur, de mettre en place un critère de « performance en matière de responsabilité sociale », décomposé en cinq sous-critères relatifs :
– à la protection de l’environnement ;
– aux aspects sociaux et sociétaux ;
– à la performance économique durable ;
– aux aspects gouvernance.
Ce critère et ces sous-critères étaient notamment évalués sur la base d’une appréciation d’éléments généraux, tels que la « lutte contre les discriminations » et le « respect de l’égalité hommes / femmes », la « sécurité et la santé du personnel », la « stabilité des effectifs ».
Pour le Conseil d’Etat, les conditions précitées ont un champ d’application trop large, ne permettant pas d’identifier le lien avec l’objet du marché ou ses conditions d’exécution :
« 8. Considérant qu’il ressort des pièces du dossier soumis au juge des référés du tribunal administratif de Nantes que Nantes Métropole a prévu un critère de sélection relatif à la » performance en matière de responsabilité sociale « , pondéré à hauteur de 15 % de la note totale, décomposé en cinq sous-critères relatifs à la » protection de l’environnement « , aux » aspects sociaux « , aux » aspects sociétaux « , à la » performance économique durable » ainsi qu’aux » aspects gouvernance » des entreprises candidates ; que l’article 2.5 du règlement de la consultation précise que l’utilisation de ce critère s’inscrit dans le cadre d’une politique dite » Achats Durables » de l’acheteur qui » implique que l’entreprise doive, tout en assurant sa performance économique, assumer ses responsabilités au regard des objectifs du développement durable c’est-à-dire dans les domaines environnementaux, sociaux et sociétaux » ; qu’il ressort du » cadre de réponse diagnostique RSE » prévu par le dossier de consultation, que ce critère est évalué sur la base d’une appréciation d’éléments généraux, tels que la » lutte contre les discriminations » et le » respect de l’égalité hommes / femmes « , appréciés au regard du taux d’emploi et de la rémunération des travailleurs handicapés et féminins, la » sécurité et la santé du personnel « , évaluées sur la base du nombre d’accidents du travail pendant les trois dernières années et de la durée totale des arrêts de travail sur le dernier exercice, les dépenses de formation du personnel engagées par l’entreprise, la » stabilité des effectifs » et la limitation du recours aux contrats d’intérim, ou encore la formation active des stagiaires et apprentis par des tuteurs certifiés ; que, contrairement à ce que soutient Nantes Métropole, le juge des référés du tribunal administratif de Nantes n’a pas dénaturé les pièces du dossier en estimant que le critère de » performance en matière de responsabilité sociale » ne concerne pas seulement les conditions dans lesquelles les entreprises candidates exécuteraient l’accord-cadre en litige mais porte sur l’ensemble de leur activité et a pour objectif d’évaluer leur politique générale en matière sociale, sans s’attacher aux éléments caractérisant le processus spécifique de réalisation des travaux d’impression prévus par le contrat ; qu’il résulte de ce qui a été dit au point précédent que le juge des référés n’a pas commis d’erreur de droit en en déduisant que ce critère n’a pas un lien suffisant avec l’objet du marché ou ses conditions d’exécution ; ».