Par un arrêt du 24 avril 2019, le Conseil d’Etat a précisé la portée de l’ordonnance de cristallisation des moyens prise par le juge du fond sur le fondement de l’article R. 600-4 du code de l’urbanisme. De plus, il rappelle que le moyen tiré des irrégularités entachant le permis de construire initial, régularisées par le pétitionnaire par un permis modificatif en l’absence de toute intervention du juge, est inopérant.
En l’espèce, un permis de construire autorisant la démolition partielle d’une maison d’habitation et la construction de deux nouvelles maisons a été délivré. Un premier permis de construire modificatif a été délivré, puis le maire a délivré au pétitionnaire un nouveau permis de construire modificatif ayant le même objet que le premier, avec un dossier de demande modifié. Toutefois, plusieurs requérants ont sollicité l’annulation de ces arrêtés, mais leurs requêtes ont été rejetées par ordonnance. Cette ordonnance a été cassée par le Conseil d’Etat qui a renvoyé l’affaire au tribunal. Celui-ci a une nouvelle fois rejeté leurs requêtes.
Saisi à nouveau, et s’appuyant sur l’article R. 600-4 du code de l’urbanisme, le Conseil d’Etat précise que le pouvoir du juge administratif de cristalliser les moyens sur le fondement de l’article R.600-4 du code de l’urbanisme est limité à l’instance pendante devant la juridiction à laquelle il appartient. Ainsi, « son ordonnance perd son objet et cesse de produire ses effets avec la clôture de l’instruction dans le cadre de cette instance. Il s’ensuit que l’usage, avant cassation, de la faculté prévue par l’article R. 600-4 du code de l’urbanisme est sans incidence sur la recevabilité des moyens que peuvent soulever les parties, après cassation et renvoi, à l’appui de leurs conclusions devant le juge du fond ». Par conséquent, les dispositions de l’article R. 600-4 du code de l’urbanisme ne faisaient pas obstacle à ce que les requérants soulèvent de nouveaux moyens à l’occasion de la procédure ayant été reprise à la suite de l’annulation et du renvoi prononcés par le Conseil d’Etat.
En outre, réglant l’affaire au fond, le Conseil d’Etat ajoute que « lorsqu’un permis de construire a été délivré en méconnaissance des dispositions législatives ou réglementaires relatives à l’utilisation du sol ou sans que soient respectées des formes ou formalités préalables à la délivrance des permis de construire, l’illégalité qui en résulte peut être régularisée par la délivrance d’un permis modificatif dès lors que celui-ci assure le respect des règles de fond applicables au projet en cause, répond aux exigences de forme ou a été précédé de l’exécution régulière de la ou des formalités qui avaient été omises. Les irrégularités ainsi régularisées à la suite de la modification de son projet par le pétitionnaire et en l’absence de toute intervention du juge ne peuvent plus être utilement invoquées à l’appui d’un recours pour excès de pouvoir dirigé contre le permis initial ».