Par un arrêt en date du 19 octobre 2012 publié au Recueil, le Conseil d’Etat a rappelé avec force les différentes étapes successives du contrôle de l’utilité publique d’une opération nécessitant une expropriation qui s’imposent au juge administratif tout en censurant, en l’espèce, le raisonnement tronqué utilisé par les juges du fond.
Il faut rappeler que le contrôle de l’utilité publique comporte trois étapes successives :
– l’opération doit répondre à une finalité d’intérêt général ;
– aucun autre moyen que l’expropriation ne doit être possible pour la réalisation de l’opération dans des conditions équivalentes (tel est le cas lorsque des biens se trouvent dans le patrimoine de l’expropriant) ;
– les atteintes à la propriété privée, le coût financier et, le cas échéant, les inconvénients d’ordre social ou économique que comporte l’opération ne doivent pas être excessifs eu égard à l’intérêt qu’elle présente (contrôle du bilan coûts-avantages dégagé par l’arrêt « Ville Nouvelle Est – CE ass., 28 mai 1971, n° 78825).
Or, au cas particulier, c’est précisément sur les deux dernières étapes du raisonnement que le Conseil d’Etat relève une erreur de droit commise par la Cour administrative d’appel de Versailles.
En effet, cette dernière avait mélangé ces deux étapes en jugeant que l’opération en cause (qui concernait la réalisation de logements sociaux) n’avait pas un caractère d’utilité publique au motif qu’elle présentait des inconvénients d’ordre social et économique excessifs du seul fait que la commune expropriante disposait de plusieurs terrains et immeubles pouvant être utilisés pour la réalisation de ce projet.
La Haute juridiction administrative a donc censuré ce « raccourci » opéré par le juge d’appel en rappelant que la prise en compte de la circonstance que la collectivité expropriante dispose de terrains disponibles doit mener à la conclusion que l’opération peut être menée ou non dans des conditions équivalentes sans qu’il soit besoin d’exproprier.