Encadrement des cas nécessitant de recueillir l’avis du Préfet lors d’une demande relative à un projet portant sur une construction ou une installation destinée à l’exercice d’un culte

Dans une décision rendue le 25 juillet 2022, le Conseil d’Etat a jugé que la consultation du préfet n’est requise que lorsque la demande d’autorisation individuelle porte sur un projet ayant pour effet de créer ou d’étendre significativement une construction ou une installation destinée à l’exercice d’un culte.

En l’espèce, par un arrêté du 3 août 2018, la maire de Bagneux a accordé à une association le permis de construire un centre culturel et musulman.

Par un arrêté du 11 octobre 2021, la Maire de Bagneux a accordé à cette même association un permis de construire modificatif se rapportant au même projet.

Par un courrier du 7 décembre 2021, le Préfet des Hauts-de-Seine a vainement demandé à la maire de Bagneux de retirer le permis de construire modificatif au motif qu’il aurait dû être préalablement saisi pour avis en vertu de l’article L. 422-5-1 du code de l’urbanisme. Un refus de retrait de cet arrêté a été opposé le 15 décembre 2021.

Par une ordonnance du 8 février 2022, le juge des référés du tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté la demande du préfet tendant à la suspension de l’arrêté du 11 octobre 2021 et du refus de retrait opposé le 15 décembre 2021.

Par une ordonnance du 12 avril 2022, le juge des référés de la cour administrative d’appel de Versailles a annulé l’ordonnance du 8 février 2022 du juge des référés de première instance, fait droit à la demande de suspension du préfet des Hauts-de-Seine et a refusé de transmettre au Conseil d’Etat la question prioritaire de constitutionnalité soulevée par la commune de Bagneux contre l’article L. 422-5-1 du code de l’urbanisme.

Saisi par la commune de Bagneux d’un pourvoi en cassation contre l’ordonnance du 12 avril 2022, le Conseil d’Etat devait se prononcer d’une part sur la transmission de la question prioritaire de constitutionnalité et d’autre part sur la question de savoir si la commune de Bagneux aurait dû, en application des dispositions de l’article L. 422-5-1 du code de l’urbanisme, obtenir l’avis du Préfet des Hauts-de-Seine avant d’accorder le permis de construire modificatif.

Seul le second point retiendra notre attention.

Aux termes de l’article L. 422-5-1 du code de l’urbanisme :

« Lorsque le maire ou le président de l’établissement public de coopération intercommunale est compétent, il recueille l’avis du représentant de l’Etat dans le département si le projet porte sur des constructions et installations destinées à l’exercice d’un culte ».

Le Conseil d’Etat a jugé qu’il résultait de ces dispositions, éclairées par les travaux préparatoires de la loi du 24 août 2021 dont elles sont issues que :

« la consultation qu’elles prévoient n’est requise que lorsque la demande dont le maire ou le président de l’établissement public de coopération intercommunale est saisi porte sur un projet ayant pour effet de créer ou d’étendre significativement une construction ou une installation destinée à l’exercice d’un culte ».

Appliquant cette solution à l’espèce, le Conseil d’Etat relève :

« qu’en jugeant que le permis modificatif entrait dans le champ de la consultation obligatoire du Préfet prévue à l’article L. 422-5-1 du code de l’urbanisme que le projet portait sur l’aménagement intérieur de salles de prières et que la surface commerciale créée n’était  » pas sans lien  » avec l’exercice d’un culte, sans rechercher si le projet avait pour effet de créer des constructions ou installations destinées à l’exercice d’un culte ou de les étendre de manière significative, le juge des référés de la cour administrative d’appel a commis une erreur de droit »

Réglant l’affaire en application des dispositions de l’article L. 821-2 du code de justice administrative, le Conseil d’Etat juge que :

« Ni la réorganisation des espaces de prière, se traduisant par la réduction globale des surfaces qui leur sont réservées, ni la création d’un espace commercial, non destiné à l’exercice du culte, ni les autres modifications résultant de ce permis modificatif ne peuvent être regardées comme créant des constructions ou installations destinés à l’exercice du culte ou comme étendant significativement celles dont la création a été autorisée par le permis de construire initial délivré le 3 août 2018 »

En l’espèce, le Conseil d’Etat juge que l’avis du Préfet n’était pas nécessaire malgré la création d’un espace commercial dès lors que cette création n’était pas destinée à l’exercice d’un culte.

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