Collectivités territoriales : Droit au respect de la vie familiale pour les occupants irréguliers de longue date

L’affaire concerne une procédure d’expulsion diligentée contre des familles du voyage qui habitaient un lieu-dit, depuis de nombreuses années, sur la Commune d’Herblay.

Cette implantation concernait 400 ou 500 caravanes dont la majorité étaient en infraction avec le POS.

En 2000, une maîtrise d’œuvre urbaine et sociale (MOUS), fut mise en place pour le relogement des gens du voyage sédentarisés sur la Commune.

Le Schéma départemental d’accueil et d’habitat des gens du voyage 2004-2010 a exonéré la Commune d’HERBLAY, en raison du nombre de caravanes de familles sédentaires qu’elle compte.

En septembre 2004, la commune a fait assigner plusieurs occupants « illégaux » devant le juge du fond (TGI de PONTOISE) lequel condamna les requis à évacuer les lieux. Cette décision fut confirmée par arrêt de la Cour d’appel. Un pourvoi en cassation fut formé mais les requérants se désistèrent.

Invoquant en particulier une violation de l’article 8 de la CESDH (droit au respect de la vie privée et familiale) combiné avec l’article 14 (interdiction de la discrimination) les requérants se plaignaient de ce que leur condamnation à l’évacuation de terrain qu’ils occupaient de longue date constituait une violation de leur droit au respect de leur vie privée et familiale ainsi que de leur domicile.

Constant une violation de l’article 8, la CEDH dispose :

« La Cour considère que la présente requête se rapproche de l’affaire Yordanova et autres précitée, où elle était appelée à examiner la conformité avec l’article 8 de la décision des autorités municipales bulgares d’expulser une communauté de Roms sédentaires d’un terrain qu’ils occupaient depuis de nombreuses années à Sofia.

 Dans cette affaire, la Cour a relevé que, si les autorités avaient en principe le droit d’expulser les requérants, qui occupaient un terrain communal illégalement (§ 120), elles n’avaient accompli aucune démarche en ce sens pendant de nombreuses années et avaient ainsi de facto toléré cette occupation illégale. Dès lors, la Cour a estimé que ce fait était hautement pertinent et aurait dû être pris en considération ;

α)  Sur l’examen de la proportionnalité par les autorités compétentes :

Pour conclure, dans l’arrêt Yordanova et autres, que l’exigence de proportionnalité qui découle de l’article 8 § 2 n’avait pas été respectée, la Cour a en premier lieu tenu compte de ce que, d’une part, les autorités municipales, conformément au droit interne applicable, n’avaient pas mentionné dans l’ordre d’expulsion d’autres motifs que l’illégalité de l’occupation du terrain et, d’autre part, que les juridictions internes avaient refusé d’entendre les arguments des requérants relatifs à la proportionnalité et à la longue période d’occupation paisible du terrain par eux-mêmes et leurs familles (§ 122). (…)

La Cour conclut donc que les requérants n’ont pas bénéficié, dans le cadre de la procédure d’expulsion, d’un examen de la proportionnalité de l’ingérence conforme aux exigences de l’article 8 ».

Sur le plan pratique, cette décision rappelle que le fait de laisser perdurer une occupation irrégulière peut rendre impossible l’expulsion.

Sources et liens

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