Absence de régularisation d’un vice du fait d’un changement de droit

Le Conseil d’Etat a jugé qu’un vice entachant une autorisation d’urbanisme ne peut être regardé comme ayant été régularisé, à la suite d’un sursis à statuer du juge, par la seule circonstance que le vice relevé n’en est plus un à l’aune d’un changement de droit, à la date à laquelle le juge statue à nouveau (CE, 10ème et 9ème chambres réunies, 4 mai 2023, n°464702, Publié au recueil Lebon).

Par deux arrêtés, le maire d’une commune a délivré à une société de construction un permis de construire et un permis de construire modificatif pour la réalisation d’un bâtiment à usage de logement et de commerce.

Saisi par une association, le tribunal administratif de Toulouse a toutefois sursis à statuer pour permettre la régularisation du projet de la société pétitionnaire, eu égard à l’existence d’un vice vis-à-vis de la règle de hauteur fixée par le règlement du plan local d’urbanisme (PLU) de la commune dans sa rédaction en vigueur à la date des décisions attaquées. Estimant, à l’issue du délai fixé pour cette régularisation, que celle-ci n’était pas intervenue, le tribunal administratif a annulé les décisions attaquées.

Saisi à son tour, le Conseil d’Etat a tout d’abord rappelé que lorsqu’une autorisation d’urbanisme a été délivrée en violation des dispositions législatives ou réglementaires relatives à l’utilisation du sol ou sans que soient respectées des formes ou formalités préalables à la délivrance de l’autorisation, l’illégalité qui en résulte peut être régularisée par la délivrance d’une autorisation modificative dès lors que celle-ci assure le respect des règles de fond applicables au projet en cause, répond aux exigences de forme ou a été précédée de l’exécution régulière de la ou des formalités qui avaient été omises.

Le Conseil d’Etat a ensuite précisé que cette illégalité peut, de même, être régularisée par une autorisation modificative si la règle relative à l’utilisation du sol qui était méconnue par l’autorisation initiale a été entretemps modifiée ou si cette règle ne peut plus être regardée comme méconnue par l’effet d’un changement dans les circonstances de fait de l’espèce. Et il en va de même dans le cas où le bénéficiaire de l’autorisation initiale notifie en temps utile au juge ayant sursis à statuer sur une demande tendant à l’annulation de l’autorisation initiale, en application de l’article L. 600-5-1 du code de l’urbanisme, une décision individuelle de l’autorité administrative compétente valant mesure de régularisation.

Ceci étant précisé, le Conseil d’Etat a en revanche jugé que la seule circonstance que le vice dont est affectée l’autorisation initiale et qui a justifié le sursis à statuer résulte de la méconnaissance d’une règle d’urbanisme qui n’est plus applicable, du fait d’un changement de droit, à la date à laquelle le juge statue à nouveau sur la demande d’annulation, après l’expiration du délai imparti aux intéressés pour notifier la mesure de régularisation, est insusceptible, par elle-même, d’entraîner une telle régularisation et de justifier le rejet de la demande.

Dès lors, en jugeant que la circonstance que la règle de hauteur fixée par le règlement du PLU avait été modifiée par une délibération de la commune et que le projet était conforme à cette nouvelle règle n’était pas de nature, pour autant, à régulariser le vice initial entachant les décisions attaquées, en l’absence de mesure effective de régularisation, le Conseil d’Etat a ainsi conclu que le tribunal administratif de Toulouse n’avait pas commis d’erreur de droit.

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