Exproprié pour réhabiliter !

Le décret n° 2025-419 du 12 mai 2025 définit le régime juridique applicable à la procédure d’expropriation pour cause d’utilité publique à titre remédiable, instaurée afin de permettre l’intervention anticipée de l’autorité administrative sur des immeubles dégradés mais réhabilitables, dans une perspective de préservation du parc bâti et de mise en œuvre des politiques de renouvellement urbain.

Ce décret précise les modalités d’application de la procédure d’expropriation pour cause d’utilité publique à titre remédiable, prévue par l’article 9 de la loi n° 2024-322 du 9 avril 2024.

Cette procédure, désormais codifiée aux articles L. 512-1 et suivants du code de l’expropriation pour cause d’utilité publique, vise à permettre à l’autorité administrative d’intervenir sur des immeubles dégradés mais réhabilitables, avant qu’ils ne deviennent irrémédiablement insalubres. Elle s’inscrit dans la volonté de renforcer la prévention en matière d’habitat dégradé et d’accélérer les grandes opérations d’aménagement urbain.

La procédure d’expropriation à titre remédiable se distingue de celle à titre irrémédiable (articles L. 511-1 et suivants) par la finalité poursuivie : il ne s’agit pas de procéder à une démolition, mais de permettre des travaux de remise en état susceptibles de préserver l’immeuble.

Elle peut être engagée lorsque, dans les dix années précédentes, au moins deux arrêtés (de mise en sécurité ou de traitement de l’insalubrité) ont été pris sans être totalement exécutés ou ont nécessité une exécution d’office. Elle est également conditionnée à la nécessité de travaux pour stopper la dégradation de l’immeuble, ainsi qu’à la mise en place d’un projet de relogement si les logements sont occupés.

Le décret harmonise les modalités de publicité, d’affichage et de notification de cette nouvelle procédure avec celles de la procédure d’expropriation à titre irrémédiable. Il encadre notamment la déclaration de cessibilité, qui doit être précédée d’une enquête parcellaire, la désignation du bénéficiaire de l’expropriation par arrêté préfectoral, et fixe les délais applicables à chaque étape de la procédure.

Il précise également que l’autorité administrative doit établir un dossier justifiant du caractère remédiable de l’immeuble et démontrer que la réhabilitation est effectivement envisageable à un coût raisonnable.

En matière d’indemnisation, le décret prévoit que l’évaluation du bien doit tenir compte à la fois de l’état de dégradation de l’immeuble et du marché immobilier local. Lorsque des références comparables font défaut, l’estimation peut inclure un abattement proportionnel au niveau de dépréciation du bien, sans pour autant annuler le droit à une indemnité juste et préalable.

Le texte encadre aussi les conditions dans lesquelles l’indemnité peut être consignée en cas de difficultés pour identifier les ayants droit ou en l’absence de contestation dans les délais.

Enfin, le décret permet une articulation avec les procédures d’aménagement ou de traitement de l’habitat indigne, en prévoyant que l’expropriation à titre remédiable peut être intégrée dans un projet d’ensemble, sous réserve de cohérence avec les objectifs de réhabilitation et de maintien dans le tissu urbain.

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