Des pénalités équivalentes à 97% du montant du marché, c’est possible

La Cour administrative d’appel de Bordeaux a récemment validé l’application de pénalités au titulaire d’un marché, pour un montant équivalent à plus de 97% du montant du contrat (CAA de Bordeaux, 6ème chambre, 19 octobre 2022, n°20BX02818).

Il est désormais admis que le juge administratif peut, s’il est saisi de conclusions en ce sens par une partie, modérer ou augmenter les pénalités de retard résultant du contrat si elles atteignent un montant manifestement excessif ou dérisoire, eu égard au montant du contrat et compte tenu de l’ampleur du retard constaté dans l’exécution des prestations (CE 19 juillet 2017, n°392707 ; CE, 29 décembre 2008, n° 296930).

Toutefois, avant toute modulation du montant des pénalités, le juge doit préalablement vérifier leur caractère manifestement excessif, au regard d’un faisceau d’indices.

Bien qu’il ne soit pas possible de généraliser le raisonnement du juge, il est fréquent de constater que la modulation des pénalités s’établit aux environs du tiers du montant du marché initial.

Toutefois dans l’affaire qui était soumise à la CAA de Bordeaux, le juge vient moduler les pénalités qui avaient initialement été appliquées par le maître d’ouvrage au titulaire du marché, à un montant équivalent à 97% du montant HT du marché initial.

La commune de la Rochelle avait conclu avec une entreprise un marché à bons de commande ayant pour objet l’acquisition d’une solution de gestion, sa mise en œuvre, et les prestations d’installation, de paramétrage, de formation, d’assistance et de maintenance associées au projet de remplacement du logiciel interne, pour un montant de 223 752 euros TTC, soit environ 185 000 euros HT.

La Cour considère qu’il y a lieu de fixer le montant des pénalités à 180 000 euros (contre 741 000 euros appliqués initialement par le maître d’ouvrage).

Le raisonnement du juge se fonde sur le préjudice subi par la collectivité en raison des carences du titulaire, à l’ampleur du retard et à la durée d’indisponibilité de certaines fonctionnalités.

Cet arrêt se situe donc dans un courant jurisprudentiel tendant à ne pas « plafonner » les pénalités, lorsque la situation le justifie. La CAA de Paris avait déjà jugé en ce sens qu’un retard équivalent à plus du double de la durée du marché justifie l’application de pénalités représentant 61% du montant du marché (CAA Paris, 24 juin 2019, n°17PA02639).

Sources et liens

À lire également

Droit de la commande publique
Le Conseil d’Etat fixe les règles concernant la durée unique d’une délégation multiservices
Dans le cadre de contrats de délégation multiservices, une durée unique peut être fixée par l’autorité concédante, sous conditions (CE,...
Droit de la commande publique
En concession, une offre initiale irrégulière peut être régularisée en cours de négociation
Dans le cadre de la procédure de passation d’un contrat de concession, le Conseil d’Etat admet que la régularisation d’une...
Droit de la commande publique
Le décret du 30 décembre 2024 portant diverses mesures de simplification du droit de la commande publique porte-t-il bien son nom ?
Le décret n°2024-1251 du 30 décembre 2024 qui a été publié au Journal Officiel le 31 décembre modifie le Code...
Droit de la commande publique
Contrats publics : Un CCAP peut valablement déroger à la procédure d’établissement d’un décompte général et définitif tacite sans mentionner explicitement l’article du CCAG auquel il déroge
Par un arrêt du 16 octobre 2024, la cour administrative d’appel de Douai a jugé qu’un CCAP rédigé de manière...