Expropriation : Quand absence de travaux rime avec droit de rétrocession !

Par une décision du 2 février 2017, la Cour de cassation a précisé les dispositions de l’ancien article L. 12-6 du Code de l’expropriation pour cause d’utilité publique, désormais codifié à l’article L. 421-1 du même Code, relatif aux modalités d’exercice du droit de rétrocession ouvert aux anciens propriétaires de biens expropriés.

Les faits sont les suivants.

Par ordonnance du 13 janvier 2006, le juge de l’expropriation a prononcé le transfert de propriété de deux parcelles, faisant partie d’un parc d’activités économiques déclaré d’utilité publique par un arrêté préfectoral de 2005 au profit d’un établissement public foncier (EPF).

Toutefois, l’ancien propriétaire soutient que les travaux n’ont pas débuté dans le délai de 5 ans à compter de l’ordonnance, et a assigné l’EPF en paiement de dommages-intérêts, la restitution des parcelles étant rendue impossible dans la mesure où elles avaient déjà été cédées à un tiers.

Une expertise a donc été ordonnée en première instance afin d’évaluer l’indemnisation du préjudice.

L’EPF se pourvoit en cassation.

La Haute juridiction estime, dans le même sens, que la circonstance que des travaux ont été réalisés sur des parcelles voisines, au demeurant expressément exclues du périmètre de la DUP ou incluses mais ayant été cédées amiablement par les propriétaires à un promoteur privé, ne saurait fermer à l’ancien propriétaire l’opportunité d’un droit à rétrocession au motif que « les immeubles expropriés en application du présent code n’ont pas reçu dans le délai de cinq ans la destination prévue ou ont cessé de recevoir cette destination » (L. 12-6 du Code).

Elle déduit, en effet, des circonstances de l’espèce que « ces travaux ne pouvaient être pris en compte pour apprécier si la destination prévue à la déclaration d’utilité publique avait été réalisée, même partiellement, dans les cinq ans de l’ordonnance ».

Il en va de même, du reste, de la réalisation d’un ouvrage public (carrefour giratoire) antérieur à la DUP, ce dernier ne pouvant dès lors pas être inclus dans les travaux d’équipements liés à la réalisation du projet de DUP.

Partant, la destination prévue par la DUP n’ayant pas été réalisée, l’ancien propriétaire peut bénéficier de la rétrocession de son bien ou, à défaut, d’une indemnisation pécuniaire.

Cette conclusion paraît juste et en concordance avec la lettre même des dispositions du Code précitées.

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