L’absence de précision de l’objet d’un permis modificatif sans incidence sur la régularisation du permis initial

Le Conseil d’Etat a jugé qu’il n’est pas nécessaire qu’une autorisation d’urbanisme modificative ait été formellement sollicitée et délivrée pour régulariser une autorisation initiale, pour qu’elle puisse être regardée comme ayant procédé à cette régularisation (CE, 1ère et 4ème chambres réunies, 30 juin 2023, n°463230, Mentionné aux tables du recueil Lebon).

Par un arrêté, le maire de Fenouillet (Haute-Garonne) a délivré à une société un permis de construire un ensemble immobilier de quarante-cinq logements. Des voisins du projet ont demandé au tribunal administratif de Toulouse d’annuler cette autorisation. Par un premier jugement, ce tribunal administratif a sursis à statuer, en application de l’article L. 600-5-1 du code de l’urbanisme, afin de permettre la régularisation d’un vice tenant à l’incompétence du signataire de l’arrêté de permis de construire. Par la suite, un permis de construire modificatif tacite a été délivré à la société pétitionnaire. Par un second jugement, ce même tribunal administratif, estimant que ce permis modificatif ne régularisait pas le vice relevé dans le premier jugement, a annulé le permis délivré.

Saisi de ces deux jugements, le Conseil d’Etat a d’abord rappelé que, lorsqu’une autorisation d’urbanisme est entachée d’incompétence, a été délivrée en violation des dispositions législatives ou réglementaires relatives à l’utilisation du sol ou sans que ne soient respectées des formes ou formalités préalables à sa délivrance, l’illégalité qui en résulte peut être régularisée par la délivrance d’une autorisation modificative dès lors que celle-ci est compétemment accordée pour le projet en cause, qu’elle assure le respect des règles de fond applicables à ce projet, répond aux exigences de forme ou a été précédée de l’exécution régulière de la ou des formalités qui avaient été omises.

Le Conseil d’Etat a ensuite également rappelé que cette autorisation d’urbanisme peut être régularisée par une autorisation modificative si la règle relative à l’utilisation du sol méconnue par l’autorisation initiale a été entretemps modifiée ou si cette règle ne peut plus être regardée comme méconnue par l’effet d’un changement dans les circonstances de fait de l’espèce. Et il en va de même dans le cas où le bénéficiaire de l’autorisation initiale notifie en temps utile au juge une décision individuelle de l’autorité administrative compétente valant mesure de régularisation, à la suite d’un jugement de sursis à statuer sur une demande tendant à l’annulation de l’autorisation initiale, en application de l’article L. 600-5-1 du code de l’urbanisme. Ainsi, dès lors que cette nouvelle autorisation assure la régularisation de l’autorisation initiale, les conclusions tendant à l’annulation de cette dernière doivent être rejetées.

Cela étant précisé, le Conseil d’Etat a enfin jugé qu’en se fondant sur le seul motif que le dossier de demande de permis modificatif ne spécifiait pas que cette autorisation était sollicitée aux fins de régularisation du permis initial, pour estimer qu’elle n’avait pas pu régulariser le vice constaté par le jugement de sursis à statuer, et annuler en conséquence le permis initial, sans rechercher s’il ne résultait pas d’autres éléments du dossier, tels que la chronologie dans laquelle s’inscrivait la demande de permis modificatif ou les échanges avec la commune à l’occasion de son instruction, que l’autorisation modificative avait bien eu cet objet, le tribunal administratif a commis une erreur de droit.

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